Le secteur de la restauration rapide sous l'œil de l’IA : surveillance, stress et bien-être au travail
Par Blanche Mongeon

De nouveaux logiciels basés sur l'intelligence artificielle (IA) sont actuellement utilisés en restauration rapide, un domaine où travaillent plusieurs étudiant.e.s. Ces logiciels mesurent la performance des employé.es à partir du temps d'attente des clients, du nombre de cafés vendus, de la propreté des tables, etc. Toutefois, mesurer le rendement de cette façon augmente les injustices et les taux d'accident tel qu'expliqué dans ce qui suit.
Les avancées récentes en intelligence artificielle ont donné naissance à des systèmes performants d'automatisation et de reconnaissance d'image. S'il est encourageant de parler des impacts positifs de ces technologies dans notre société (Stratégie Parité sciences : discutez des usages concrets des STIMs), il demeure primordial de discuter des enjeux qu'elles soulèvent. Alors qu'on parle de plus en plus d'un développement éthique de l'IA [1], des entreprises surveillent excessivement l'activité de leurs employé.e.s avec ces systèmes. Par exemple, certaines franchises de restauration comptabilisent le nombre de fois qu'un.e employé.e suggère à la clientèle des achats supplémentaires en analysant les vidéos de leurs caméras de surveillance avec des logiciels de reconnaissance d'image.
La chercheuse Alexandra Mateescu note que l'intensification de la surveillance mène à une intensification du travail. Reed Shaw, conseiller aux politiques de Governing for Impact, avance que cela a ensuite des conséquences physiques sur les travailleur.euse.s; la montée du taux d'accidents chez les employé.e.s d'Amazon serait due à la surveillance du temps d'inactivité entre la livraison de deux colis [3]. Au Québec, des spécialistes en ressources humaines observent une hausse de la consommation de médicaments pour améliorer les performances au travail [4]. L'hypersurveillance accentue donc le stress et les attitudes négatives des employé.e.s. De plus, les indicateurs de performance utilisés assument une homogénéité des employé.e.s et ouvrent la porte à une discrimination des moins performants. Il est bien certain qu'une femme enceinte ou une personne âgée nécessitera plus de temps entre la livraison de deux colis que la moyenne.
Plusieurs entreprises se tournent vers l'utilisation de systèmes de surveillance de la productivité parce qu'ils sont facilement à leur disposition. En pleine course de profits, pourquoi se priver d'outils disponibles ? L'IA a révolutionné les dernières années; il est maintenant temps de se questionner sur son encadrement et la limite de son utilisation.
Tenez-vous-le pour dit si les domaines de la gestion d'entreprises et du personnel vous intéressent : l'ère des emplois en lien avec l'encadrement éthique des outils d'automatisation et de surveillance ne fait que commencer!
Références
[1] Guillaud, Hubert. (2024, 3 septembre). Vers une surveillance au travail sans limite. Dans les algorithmes. 🔗
[2] Goyer, M. (2024, 16 février). Au-delà des débats éthiques, le progrès. La Presse. 🔗
[3] Shaw, Reed. (2023, 2 juin). Electronic Surveillance is Short-Circuiting Employment and Labor Law. Law & Political Economy Project. 🔗
[4] Dubé, Isabelle. (2024, 28 novembre). Des pilules pour performer au boulot. La Presse. 🔗
Photo de Scott Webb
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